On apprend aujourd'hui que la Chine n'apprécie pas la mise en place d'une nouvelle taxe protectionniste de l'Union Européenne sur les panneaux solaires chinois.
Pour rappel, cette taxe est motivée par les subventions perçues par les fabricants chinois, qui leur permettent de vendre leurs produits à bas prix sur le marché européen, imposant ainsi une concurrence importante sur les fabricants européens.
En réalité, les problèmes rencontrés par l'industrie solaire européenne provient surtout de la baisse des subventions qu'elle percevait. La Chine, de son côté, a maintenu ses aides financières.
Une analyse économique s'impose. La Chine, en subventionnant les exportations de son industrie solaire, permet aux européens de profiter de bas prix sans que leurs gouvernements n'aient à dépenser en subventions. Autrement dit, en instaurant une taxe sur les importations solaires chinoises, l'Union Européenne refuse de facto un cadeau chinois.
L'argument censé justifier ce refus est qu'en l'absence de protection, l'industrie solaire européenne sera détruite et ne connaitra pas de développement. En la protégeant durant une certaine période, on lui laissera le temps d'atteindre un certain niveau de production auquel elle pourra réaliser des économies d'échelle lui permettant de rivaliser avec les prix chinois sans protection. Ainsi, si le coût associé au prix plus élevé à subir durant la période de protection est inférieur aux bénéfices qui seront à terme retirés de l'activité de l'industrie solaire, la protection peut se révéler bénéfique.
Il existe plusieurs problèmes avec cette argumentation. Premièrement, s'il est vrai que l'énergie solaire sera, à terme, profitable sans protection ni subvention, alors des investisseurs privés seront prêts à investir sans aide gouvernementale. Un contre-argument répandu à cette objection est que l'existence d'externalités positives en production (spillover effect) fait qu'un entrepreneur n'a pas intérêt à investir en premier, car son investissement et son amélioration technique sera copiée ou profitera à ses concurrents. Ainsi, aucun entrepreneur n'aura intérêt à investir. Mais comme le note Baldwin (1969), ceci n'est pas lié à la présence ou non de mesures protectionnistes. La mise en place d'une taxe sur les panneaux chinois n'aura donc pas d'effet sur l'incidence des externalités en production.
Ensuite, l'incitation donnée aux producteurs européens est de produire des panneaux solaires à un prix élevé. Une concurrence chinoise incite précisément les producteurs européens à investir davantage dans le développement technologique que dans la production, car produire des panneaux solaires leur est inutile, étant donné leur coût supérieur à celui chinois. Investir dans la technologie, en revanche, est leur stratégie optimale. Ainsi, en protégeant l'industrie, on déplace l'incitation du développement technologique vers la production de panneaux solaires peu rentables.
Enfin, les producteurs européens, s'ils savent que la protection dont ils bénéficient dépend de leur infériorité par rapport aux protecteurs étrangers, auront une incitation à rester inférieur et non à dépasser les concurrents étrangers. Bastiat ajouterait que leur activité se déplacera en plus vers le lobbying en faveur de la perpétuation du protectionnisme.
La décision de l'Union Européenne révèle ainsi une inadéquation entre moyens et objectifs exprimés. Alors que l'on prétend aider le secteur solaire européen au nom du développement des énergies renouvelables, la mesure est contre-productive et mènera à une utilisation moins répandue de l'énergie solaire en Europe.