Institut Laissez-faire : La liberté sans compromis.

Socialistes de tous les partis, laissez-nous vivre !

Comme Friedrich Hayek l'a souligné, la véritable distinction n'est pas la distinction habituelle entre les socialistes et les conservateurs (ou la droite et la gauche), mais entre les constructivistes et les libéraux, c'est-à-dire entre ceux qui pensent possible de « construire » une société et ceux qui pensent qu'il faut laisser agir les individus sans que l'on puisse savoir ce qu'il en résultera.
Pascal Salin, Libéralisme

I do not recognize anyone's right to one minute of my life

Ayn Rand

Un exemple flagrant de constructivisme est donné par Phillipe Barraud sur commentaires.com, blog se réclamant (sans doute) de la branche "de droite" des constructivistes.
 
Rarement aura-t-on vu autant d'arrogance constructiviste concentrée en quelques lignes. Ainsi, le constructiviste Barraud se réjouit de mesures socialistes qui vont 
faire disparaître un certain nombre d’établissements, dans une ville qui en compte beaucoup trop.
Beaucoup trop aux yeux de qui ? De monsieur Barraud lui-même sans doute, qui dans son omniscience divine sait exactement le nombre d'établissements de nuit que doit compter Lausanne. Un peu comme son confrère constructiviste Saint Couchepin qui avait lui décidé que le taux de fumeurs de cigarettes dans la population devait se situer à 20%.
Le problème des nuits lausannoises vient, entre autres raisons, du fait que l’offre est clairement excédentaire.
Les principes d'ajustement de l'offre et de la demande, démontrés au premier graphique de la première heure de la première leçon du premier cours de la première année du premier cycle d'études en économie, reposant sur les libres choix et la volonté de l'ensemble de la population, sont insignifiants face aux desiderata d'un constructiviste. Il sait, lui, si une offre est excédentaire. Tant pis si certains établissements sont déjà bondés au point de ne plus pouvoir entrer : illusion néolibérale sans doute, puisqu'on vous dit que l'offre est excédentaire ! Le constructiviste le sait, même s'il ne fréquente, lui, guère lesdits lieux de perdition.
Et que notre taulier se rassure: il y a beaucoup d’autres activités culturelles, sans doute plus gratifiantes, pour occuper “les jeunes”. 
Car de toutes façons, d'après Le Plan, il ne convient pas pour les jeunes d'aller en boîte de nuit. Pas ce Plan quinquennal-ci, pour le moins. Monsieur Barraud, lui, préfère jouer au scrabble en sirotant une tisane à la pamplemousse, alors pourquoi, après tout, le reste de la population ne suivrait-il pas son vénérable modèle ? En plus, le Prince le sait, ces activités sont plus gratifiantes. Seule question, les activités décidées par le constructiviste Barraud seront-elles les mêmes que celles qu'affectionne le constructiviste Berset lorsqu'il organise nos dimanches ?
 
Sinon, la population risque d'être confuse : il ne faudrait pas non plus la laisser choisir entre les activités qu'elle souhaite -  où irait-on - de même que ces utra-libéraux de Nord-Coréens laissent leur populace, laxisme suprême, choisir entre 18 coupes de cheveux différentes.
 
Mais naturellement, une fois le constructivisme engagé, comme l'avait très bien montré Hayek, des mesures de plus en plus drastiques doivent être prises pour l'appliquer, jusqu'au point de répugner même ceux qui l'ont initié (mais gageons que monsieur Barraud a encore de la marge avant d'en être là) :
Il conviendrait aussi de surveiller plus sérieusement les commerces vendant de l’alcool et des cigarettes, sachant que la plupart d’entre eux se moquent comme de colin-tampon des dispositions légales. Dans certains pays, ces commerces doivent arborer une grande pancarte, avec un numéro de téléphone, invitant les clients à dénoncer le commerçant s’il est surpris à vendre des boissons et des cigarettes à des mineurs. Hélas, chez nous, les contrôles sont aléatoires, et les sanctions dérisoires. Si un commerce devait fermer six mois pour avoir enfreint la loi, l’effet sur ses confrères serait assurément plus efficace.
Délation, mesures punitives envisagées non pas en fonction du principe de proportionnalité mais afin d'inciter la peur : les grands classiques du Siècle de l'Etat qu'on aime tous. 
 
Mais le constructiviste Barraud n'est (malheureusement) pas seul dans son combat d'arrière-garde.
 
La Genève calviniste, déjà bien plus avancée que notre Lausanne bien-aimée dans la répression du vice et la promotion de la vertu par la limitation des débits de boissons (en plus de celle des places de parc, autre péché mortel), décide elle aussi d'aller plus loin. Après tout, s'il n'y a déjà plus rien à faire à Genève passées deux heures du matin (heure où le bon Genevois dort, ainsi en a-t-il été décidé), le Genevois est encore autorisé à s'amuser jusqu'à cette heure. Sorte de permission de Carnaval malvenue dans la capitale protestante.
 
Détail piquant, les principaux adversaires de cette mesure pourtant socialo-hygiéniste se trouvent être les Jeunesses socialistes genevoises... Auxquels nous devons le magnifique slogan "faites l'amour pas les magasins", ainsi que l'argument de la protection des travailleurs... Lorsqu'il s'agissait de s'opposer à l'ouverture des magasins le dimanche.
 
C'est toujours très drôle de restreindre la liberté des autres, tant que ce ne sont pas vos petits amusements à vous qui sont touchés. Quand ils sont venus chercher les communistes, etc... Gageons que monsieur Barraud serait, de même, le premier à rougir d'indignation s'il s'agissait de fermer un opéra ou autre théâtre (sans doute d'ailleurs lourdement subventionnés, contrairement aux établissements de nuit au contraire lourdement taxés).
 
Encore une fois, il faut recadrer le débat sur les vraies questions, ou la vraie question, la seule : l'identité des droits de tous, ou le constructivisme. La violence strictement encadrée, ou le chaos sauvage de la violence utilisée pour tout et n'importe quoi. Car, comme le savait déjà Hayek en dédicaçant sa Route de la Servitude aux "socialistes de tous les partis", les étiquettes habituelles n'apportent strictement rien pour comprendre les vrais enjeux et les véritables motivations. Le seul vrai débat est entre ceux qui croient que le Droit est là pour délimiter l'usage de la force aux cas où elle est nécessaire, et ceux qui croient que la violence est un moyen légitime pour imposer leurs goûts personnels. Entre ceux qui considèrent que la Constitution est là pour rappeller nos Droits, et ceux qui la confondent avec un catalogue de caprices frivoles.