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La redevance: un impôt à supprimer

De plus en plus de voix s'élèvent pour remettre en question le rôle de Billag, l'entreprise mandatée pour assurer l'encaissement de la redevance radio-TV, ou du moins le principe actuel de la redevance. L'Office fédéral de la communication (OFCOM) a ainsi proposé de faire payer la redevance à tous les ménages, afin d'éviter les coûts de contrôle, alors qu'auparavant Stefan Meierhans, alias Monsieur Prix, avait déjà proposé de supprimer Billag et remplacer la redevance collectée par Billag par une taxe par habitant, qui s'ajouterait à l'Impôt fédéral direct (IFD).

Passer d'une redevance à une taxe serait-il un progrès? En réalité, avant de répondre à cette question, il est nécessaire de clarifier la situation actuelle : au fait, pourquoi et pour quoi exactement devons-nous payer la redevance?

Tant Billag que la jurisprudence sont très clairs à ce sujet: «les redevances sont par conséquent prélevées pour la détention d'un poste de radio ou de télévision apte à recevoir des programmes, indépendamment du fait de savoir si le détenteur du poste l'utilise et, dans l'affirmative, comment et dans quelle mesure», d'après un arrêt du 31 mai 2007 du Tribunal administratif fédéral. Un autre arrêt de la même instance a affirmé que même une absence prolongée n'implique pas une exemption; il suffit qu'un téléviseur en état de marche capable de recevoir des programmes se trouve au domicile de la personne pour qu'elle soit tenue de s'acquitter de la redevance. Et Billag elle-même précise sur son site Internet que «l'élément déterminant n'est, en effet, pas l'emploi effectif des appareils mais bien leur existence». Billag précise également que la redevance doit être payée même dans le cas où «la réception de certains programmes est mauvaise voire totalement impossible».

Autrement dit, la «redevance» payée a Billag n'a rien d'une redevance ni même d'une taxe, c'est à dire un paiement effectué en échange d'une contrepartie. L'emploi du terme «redevance» sert tout simplement à entretenir l'illusion d'un service fourni librement sur le marché et financé par ses consommateurs. En réalité, il s'agit tout simplement d'un impôt sur le patrimoine, au même titre par exemple que l'impôt sur la fortune, prélevé sur la simple possession de certains biens.

La proposition de «Monsieur Prix» doit donc être reformulée: en réalité il ne s'agirait pas de remplacer une redevance par une taxe, mais de remplacer un impôt…par un autre impôt! Quels en seraient les avantages et les inconvénients? Supprimer Billag (ou plutôt, mettre fin au privilège pour le moins incongru d'une entreprise privée de prélever un impôt) serait certainement bienvenu. La situation actuelle est hypocrite puisque c'est un impôt qui cache son nom, prélevé qui plus est de façon discriminatoire, selon le critère tout à fait arbitraire de la possession de certains appareils.

En effet, dès le moment que l'impôt doit être payé indépendamment du service censé être fourni, il n'est pas plus arbitraire de le prélever sur la possession d'un téléviseur non-utilisé, ou utilisé pour regarder des chaînes étrangères, que de le prélever sur la base de la possession d'un frigidaire ou d'un aquarium.

La «redevance» doit en outre également être payée pour le simple fait de posséder un accès rapide à Internet et la possibilité théorique de pouvoir ainsi recevoir les programmes financés par la redevance… Or, le nombre de sites web sur la toile se compte en millions, parmi lesquels seuls la petite dizaine appartenant à «SRG SSR idée suisse» ont l'incroyable arrogance d'exiger un paiement que vous les visitiez ou nous, sous le simple prétexte que vous avez la possibilité de le faire…

Quant au prétexte habituel de cet impôt, soit d'assurer un «service public» audiovisuel, il ne résiste guère à l'analyse. Bien que les programmes de radio et de télévision aient pu autrefois sembler difficiles à financer par le marché en raison de leur nature incontrôlable une fois émis, un tel argument n'est dans tous les cas plus valable depuis que des possibilités de cryptage existent. En outre, d'autres moyens de financement, comme la publicité, se sont développés: l'abondance des chaînes privées dans d'autres pays illustre amplement qu'il ne s'agit ici en aucun cas d'un service que le marché serait incapable de fournir. Il n'y a donc absolument aucune justification au fait que des personnes qui n'apprécient pas les productions de «SRG SSR idée suisse», ou ne sont tout simplement pas prêtes à les payer au prix demandé, soient néanmoins astreintes à les financer.

Finalement, seuls deux groupes peuvent être gagnants au maintien d'un financement non-marchand. D'une part, des prestataires de services médiocres, qui estiment que leur production ne serait pas choisie librement par assez de consommateurs à un prix suffisant pour qu'elle puisse se maintenir, mais qui souhaitent néanmoins imposer leur production de piètre qualité à des consommateurs captifs. Osons espérer que ce n'est pas le cas de la SSR…

D'autre part, certains consommateurs qui apprécient la production audiovisuelle financée par la contrainte peuvent trouver leur intérêt à ce qu'elle soit financée par d'autres, réduisant ainsi ce qu'eux-mêmes auraient dû payer pour la consommer sur un marché libre. Par conséquent, le prétendu «service public audiovisuel» n'est tout au plus qu'un moyen pour certains de faire payer à d'autres le prix de leurs propres goûts personnels. Il n'y a pas de raison non plus de donner satisfaction à ceux-ci.

Ce n'est pas seulement le privilège de prélèvement d'impôt de Billag qu'il faut supprimer, mais le principe même de la télévision financée par la contrainte. La question pertinente ne devrait pas être si un certain appareil se trouve au domicile d'une personne, ni en fait si elle regarde ou écoute effectivement les programmes financés par l'impôt prélevé par Billag. La question pertinente pour le paiement d'un service devrait être le libre choix du consommateur de l'acquérir au prix demandé, comme c'est le cas pour n'importe quel autre bien ou service.