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La politique routière nuit aux automobilistes

La sécurité routière est devenue une priorité nationale. Les retraits de permis pour un simple pare-brise givré et les amendes pour un dépassement de vitesse de quelques kilomètres à l’heure commencent à faire comprendre aux automobilistes que la politique de répression sur les routes n’est pas nécessairement menée pour eux, mais peut-être aussi contre eux. Le coût du permis de conduire devient de plus en plus exorbitant et il est même envisagé de devoir le repasser tous les dix ans!

Les défenseurs de la répression font souvent une présentation très orientée des coûts des accidents, ignorant les coûts d’opportunité dus à la politique sécuritaire, soit le temps perdu par les limitations excessives de vitesse, encore amplifié par le surcroît de bouchons qu’elles causent. Or, un rapide calcul en montre l’ampleur: si les limitations de vitesse et les bouchons font perdre quelques dizaines de minutes par jour à quelques millions d’automobilistes suisses, payés au salaire moyen, nous arrivons à un coût d’opportunité supérieur au coût estimé des accidents! De plus, le coût des accidents est bien ce qui est calculé dans les primes d’assurance responsabilité civile obligatoire, il est ainsi injustifié de vouloir augmenter encore ces primes sous prétexte du «coût des accidents pour la société».

Une politique efficace devrait se soucier de faire baisser les coûts liés aux accidents dans une plus grande mesure qu’elle n’augmenterait le coût d’opportunité lié au temps perdu par les restrictions de circulation. Or, moins d’un quart des accidents sont supposés imputables à la vitesse. Réduire encore plus la vitesse serait dès lors une mesure peu efficace en termes de coûts-bénéfices, d’autant plus que l’effet n’est pas certain: la vitesse illimitée sur les autoroutes allemandes n’a pas causé l’hécatombe que supposerait un lien de causalité directe entre vitesse et accidents! Quant aux radars, s’ils ne visaient réellement qu’un but de sécurité, ils devraient être tous annoncés, ce qui n’est pas le cas. Les amendes payées s’apparentent dès lors à un nouvel impôt.

De plus, une large majorité des automobilistes ne respecte déjà pas les limitations de vitesse actuelles. Une politique qui vise à renforcer les contrôles et à limiter encore plus la vitesse estelle alors légitime? Les interpellations de «chauffards» circulant au-dessus de la limite autorisée sur l’autoroute sont d’autant moins justifiées que s’ils roulaient à la même vitesse à quelques kilomètres au nord, en Allemagne, ils seraient toujours de bons citoyens. Réduire encore plus la vitesse légale sur les autoroutes est ainsi injustifié.

Autre grande cible de la répression, l’alcool, alors que seuls 10% des accidentés le sont «probablement» à cause de l’alcool. La fatigue, les médicaments ou le stress sont autant d’autres raisons non contrôlées qui peuvent augmenter le risque d’accident autant, voire plus, que l’alcool ou les drogues (encore plus criminalisées, alors que, d’après les études sérieuses, le cannabis par exemple augmente moins le risque d’accident que l’alcool au taux légal). Les comportements les plus à risque sont souvent moins facilement détectables que ceux qui peuvent très bien ne présenter que peu de danger pour autrui tout en étant condamnés, comme rouler avec un taux d’alcoolémie de 1‰ou à 180 kilomètres à l’heure sur une route déserte. A ce titre, le fait que les policiers peuvent désormais faire souffler n’importe qui dans le ballon, même si sa conduite est impeccable, est une dérive dangereuse, qui implique que chacun peut être suspecté en permanence.

La politique actuelle vise zéro mort sur les routes, c’est-à-dire une sécurité maximale. Or, le risque zéro peut-il vraiment être atteint autrement qu’en interdisant toute circulation? Si telle était réellement la volonté de la population, personne n’emprunterait les routes. Les automobilistes ne veulent pas une sécurité maximale irréaliste, mais une sécurité optimale, soit une sécurité qui vaut la peine en termes de ressources (temps et argent) investies pour l’obtenir. Des améliorations de l’infrastructure routière et une gestion du réseau plus adéquate seraient, de ce point de vue vraisemblablement plus efficaces.