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L'immoralité fondamentale du populisme interventionniste

La question m'a été posée d'innombrables fois : pourquoi le gouvernement commet-il les absurdités économiques que nous observons jour après jour ? Pourquoi le Secrétaire au Commerce intérieur, Guillermo Moreno, attaque-t-il les entrepreneurs, ferme-t-il l'économie, et commet-il tant d'autres bêtises ?

Pourquoi la Banque centrale d'Argentine elle-même détruit-elle notre monnaie ? En bref, quelle est donc la raison de cette politique économique destructrice ?

Répondre à ces questions n'est pas si facile. Certains l'expliquent par l'ignorance, d'autres par la jalousie. Il est tout à fait possible qu'il y ait un mélange de ces deux causes. Cependant, aussi étonnant que cela puisse paraître, je pense que le fond du problème est une méconnaissance de base du raisonnement économique. Le Kirchnérisme-cristinisme [la politique de l'ancien Président Néstor Kirchner et de l'actuelle Présidente Cristina Fernández de Kirchner] voient le processus économique comme une lutte pour la distribution du revenu. Dans cette vision du monde, si un secteur génère des bénéfices, c'est que d'autres doivent être perdants. Les partisans de cette idéologie ne comprennent pas que dans l'économie tous peuvent être gagnants - pour autant que l'État ne commette pas les interventions qu'ils préconisent.

Cette vision de l'économie comme une guerre se retrouve dans les discours officiels. « Ils veulent nous envahir de leurs produits importés ! Nous devons défendre la production nationale ! Les entrepreneurs doivent réduire leurs profits ! » Tous leur discours se situent sur la plan du conflit - un conflit qui ne saurait être résolu que par « la sagesse », « la bonté » et « l'équité » de la Présidente. Autrement dit, tout ce qui se passe de bon dans l'économie l'est nécessairement grâce à ces politiciens éclairés rendant justice par leurs politiques, et non en raison de l'efficacité et de la compétitivité des entreprises et de leurs employés. Une partie de ce discours obéit certainement au populisme tentant de gagner des voix en proclamant « grâce à moi, vous les marginaux, avez un revenu meilleur ». Et lorsque ce discours devient difficile à tenir par manque de ressources disponibles pour maintenir la folie dépensière, jamais ils n'accepteront la responsabilité des grossières erreurs commises. Ils se limiteront alors à dénoncer d'occultes conspirations visant à détruire la construction d'un projet bien-pensant incarné par une seule personne. Tout ceci fait partie du discours populiste, et qui sait quels peuvent bien être ses fondements psychologiques.

En réalité, l'économie n'est pas une guerre où certains gagnent et d'autres perdent. Oui, il y a bien de la concurrence entre les entreprises afin de gagner la faveur du consommateur. Mais cette concurrence consiste à investir afin de vendre les meilleurs produits aux meilleurs prix dans le but d'obtenir la faveur du consommateur. Ceci nécessite de l'investissement, de la capacité de gestion et de la création de valeur. Par ce processus d'investissement, de nouveaux emplois sont créées, augmentant ainsi la demande de main-d'œuvre, poussant les salaires à la hausse.

De plus, plus il y a d'investissement, plus il y a d'unités produites (productivité accrue), réduisant ainsi les coûts fixes par unité de production, rendant ainsi les biens et les services plus abondants et moins onéreux et permettant d'améliorer le niveau de revenu de la population. Mais cela ne se produit pas parce que les entreprises gagneraient moins : les entreprises gagnent plus parce qu'elles vendent davantage, meilleur marché et avec une qualité accrue. Leur bénéfice est dans la quantité accrue vendue. Prenons l'exemple des ordinateurs : chaque année ils sont dotés de meilleurs processeurs, d'une plus grande capacité de stockage de données, etc., alors que leurs prix demeurent stables ou baissent. Avec le téléphone portable, quelque chose de semblable se produit. Bien entendu, je parle du reste du monde, pas de l'Argentine où, grâce au modèle de substitution des importations, des « entrepreneurs » - qui sont en fait la plupart du temps plutôt des courtisans du pouvoir en place - obtiennent des privilèges les protégeant de la concurrence, leur permettant de nuire aux consommateurs en leur vendant des produits de moindre qualité à des prix plus élevés que dans le reste du monde. Il suffit de faire un tour sur Internet pour comparer les prix et la qualité des ordinateurs portables vendus aux États-Unis et en Argentine.

Mais le gouvernement ne voit pas la concurrence comme un processus dans lequel les entrepreneurs doivent investir puis lutter pour gagner la faveur des consommateurs. Au contraire, il considère que la concurrence ne fonctionne pas et que la production, les prix de vente, les salaires et même le choix des biens à produire doivent tous être planifiés par un esprit éclairé. Guillermo Moreno, le secrétaire au Commerce intérieur, est aujourd'hui le supposé « éclairé », alors qu'auparavant, il s'agissait de Bernardo Grinspun, José Bel Gelbard et tant d'autres ministres de l'Économie qui croyaient que seule la sagesse des dirigeants pourrait améliorer le revenu de la population, face à la cupidité des employeurs, alors que la « cupidité » est en réalité alimentée par la fermeture du marché à la concurrence des biens importés. Vraiment un cas psychiatrique...

Dans le cadre de cette vision autoritaire de l'économie, reposant sur la bonté éclairée des politiciens, il n'est guère possible de comprendre que la concurrence est un processus de découverte : découvrir ce que les consommateurs souhaitent, quel prix ils sont prêts à payer pour chaque produit et quelles sont les qualités qu'ils exigent. Le populisme économique inhibe la capacité d'innovation de la population et les actuels « entrepreneurs » millionnaires sont, en majorité, autant de simples lobbyistes qui font fortune de façon douteuse grâce à leur influence auprès de fonctionnaires corrompus. C'est à ce stade que l'interventionnisme cesse de n'être qu'inefficace, pour devenir foncièrement immoral, car les bénéfices des entreprises ne proviennent plus de la satisfaction des besoins de la population, mais trouvent leur source dans la mise à sac des consommateurs. Et puisque pour voler ces derniers les « entrepreneurs » nécessitent l'approbation des agents publics, leur complicité devient une gigantesque corruption où la source principale de richesse devient le pillage de la population au travers d'alliances corrompues.

Mais comme les populistes ne sont pas stupides, ils commencent alors à redistribuer de force les revenus, pour tenter de calmer les masses en leur jetant quelques miettes sous forme d'augmentations de salaire, tandis que les fonctionnaires et les pseudo-entrepreneurs amassent des piles d'argent.

D'un point de vue strictement économique, l'économie de marché tant décriée est plus efficace que le populisme interventionniste, car pour progresser le système exige inévitablement que que l'employeur soutienne ses employés par de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail, tout en rendant aussi service aux consommateurs, puisque ceux-ci n'achèteront ses biens que s'ils sont de bonne qualité et vendus à bon prix. Ce n'est pas par bienveillance que les vrais entrepreneurs s'enrichissent dans une économie de marché, mais en cherchant à obtenir la faveur des consommateurs. Contrairement à l'interventionnisme populiste, sous lequel les fortunes sont amassées sans rien investir, en pillant les consommateurs et les travailleurs, puis les réconfortant par des miettes gracieusement offertes par l'autocrate au pouvoir du moment.

Mais en plus d'être plus efficace, la grande différence de l'économie de marché par rapport à l'interventionnisme est d'être fondée sur des principes moraux et éthiques : que personne ne s'approprie ce qui n'est pas à lui. L'État et ses fonctionnaires, avec leur monopole de la violence, ne sont pas utilisés pour plumer travailleurs et consommateurs. La corruption n'est pas acceptée comme une forme de construction politique où les volontés s'achètent.

Ainsi, et pour conclure, le drame des peuples est que lorsque s'installe le populisme interventionniste, les valeurs de la société changent, la coopération volontaire étant laissée de côté au profit de l'arrogance, le vol légal, la corruption, et vivre sur le dos des autres devient un mode de vie.

Comme vous le voyez, lorsque nous comparons le capitalisme et le populisme, il n'est pas seulement question d'efficacité économique. Disons le clairement : l'économie de marché est un impératif moral contre l'immoralité du populisme interventionniste, puisque sous ce dernier, la corruption et le pillage règnent. La décence, l'honnêteté dans la fonction publique et la transparence dans les activités du gouvernement ne font pas partie du populisme interventionniste. Le populisme interventionniste n'est donc pas seulement inefficace en tant que forme d'organisation économique, mais est aussi et surtout fondamentalement immoral, de par la nature même de son fonctionnement.